omptant comme l’une
des cultures agricoles les plus gourmandes en pesticides, la production de
raisins concentre à elle seule environ 15 % des pesticides de synthèse
appliqués aux grandes cultures, alors même que l’ensemble de ses cultures ne
couvre que 3,5 % de la surface agricole. Un lourd tribut loin d’être sans
conséquences sur le consommateur final puisqu’une étude, publiée en avril
dernier, enregistrait un taux maximal de
contamination du vin aux pesticides s’élevant jusqu'à 5800 fois les
Concentrations Maximales Admissibles (CMA) autorisées dans l’eau du robinet.
ourtant, des
alternatives biologiques aux traitements chimiques existent et sont déjà
mises en application dans certaines régions. Pour les viticulteurs non
convertis à la culture bio, une solution permet sinon de les supprimer, du
moins d’en limiter l’utilisation. Ainsi, nombreux sont ceux à avoir adopté
la technique dite de " l’enherbement ", laquelle consiste à recouvrir
partiellement ou totalement les sols des vignobles d’herbe semée ou
spontanée. Bien qu’elle ne se substitue pas intégralement aux pesticides,
elle en limite l’utilisation. D’une part, cette couverture verte permanente
réduit les risques de voir se développer le Botrytis ou " pourriture
grise ", champignon s’attaquant aux récoltes. Par ailleurs, neuf
viticulteurs sur dix pratiquant l’enherbement entre tous les rangs de leurs
vignes déclarent restreindre l’application d’herbicides aux seuls rangs de
vigne. Or, cela revient à diviser par trois les quantités déversées.

Part des surfaces de vignes, à raisins de cuve, enherbées en 2006
i elle reste méconnue
du grand public, cette pratique ne fait plus mystère au sein des populations
de viticulteurs. Pour preuve, elle a concerné, à un degré plus ou moins
important (cf. tableau), un tiers du vignoble français en 2006 d’après un
récent rapport du Service de l’Observation et des Statistiques (SOeS) (1).
Un chiffre qui s’explique aisément au regard des nombreux avantages qu’offre
cette couverture permanente du sol. Elle conduit, en effet, à une meilleure
maîtrise de la vigueur de la vigne, instaurant une concurrence entre la
vigne et l’herbe pour l’apport en eau et en éléments nutritifs. Cela profite
tout particulièrement aux viticulteurs bordelais et alsaciens, lesquels sont
souvent contraints de délester leurs vignes de leurs grappes encore vertes
pour en diminuer le rendement. Parallèlement, l’enherbement améliore la
portance du sol et facilite, de ce fait, le passage des engins d’entretien,
même en cas de pluviométrie capricieuse. Enfin, il s’impose également comme
un moyen de lutte efficace contre les phénomènes d’érosion et de
ruissellement des eaux.
n Alsace, au Bordelais
et dans les Charentes, le couvert permanent dans les vignes est largement
intégré depuis une quinzaine d’années. Il est, en revanche, moins présent en
Champagne et dans les vignobles méditerranéens. La principale raison en est
l’écart restreint séparant les rangs des vignes, caractéristique de
certaines régions. En Champagne, l’écart entre les rangs est à peine
supérieur à un mètre, handicapant le passage des engins nécessaires à
l’entretien du couvert. Le même problème sévit au sein des vignobles de
Bourgogne et du Beaujolais. De manière globale, « là où les rangs sont
séparés de moins de 1,20 m, le couvert n’est adopté que sur 20 % des
surfaces ».
Malgré les contraintes techniques auxquelles elle est confrontée, la méthode
de l’enherbement illustre les options qui se présentent aux viticulteurs
français pour rompre avec une tradition chère aux pesticides. Même si le
chemin s’annonce semé d’embûches.
|